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le blog poilagratter

Paul Lafargue

9 Juin 2008 , Rédigé par momo Publié dans #Histoire

 

 

Paul Lafargue : Le Droit à la Paresse : morceaux choisis

 

 

« Dans la société capitaliste, le travail est la cause de toute dégénérescence intellectuelle, de toute déformation organique. »

 

« Et à propos de la durée du travail, Villermé observait que les forçats des bagnes ne travaillaient que 10 heures, les esclaves des Antilles 9, tandis que dans la France qui avait fait la Révolution, qui avait proclamé les Droits de l’Homme, la journée de travail était de 16 heures. »

Si aujourd’hui, elle n’est plus que 7h 45, en tôle les travaux forcés, c’est terminé. C’est nous qui bossons pour eux ; pour eux qui ont commis des crimes contre nous. Les faire travailler pour nous faire économiser nos impôts (ils nous devraient au moins cela) ? Pensez-vous ! Ce serait contraire à cette fumisterie de Droits de l’Homme. Le Droit au Travail qui y figure, ce n’est que pour les esclaves que nous sommes… et que nous acceptons d’être. NDLR

 

« Et dire que les fils des héros de la Terreur se sont laissés dégrader par la religion du travail au point de d’accepter après 1848, comme une conquête révolutionnaire, la lois qui limitait à 12 heures le travail dans les fabriques ; ils proclamaient comme un principe révolutionnaire, le Droit au Travail. Honte au prolétariat français ! Des esclaves seuls eussent été capables d’une telle bassesse. »

Le résultat fut la création des Atelier Nationaux qui furent immédiatement un échec économique. Produire massivement ? Pour vendre à qui ? A l’époque, seule la bourgeoisie avait les moyens de consommer massivement. On préfère ne se souvenir que de l’abolition de l’esclavage. Hors, aujourd’hui, avec la baisse du pouvoir d’achat de la basse classe et même de la classe moyenne, on retrouve un cas de figure comparable à celui de 1848… et des projets sarkosistes (heures supplémentaires) du type Ateliers Nationaux (NDLR).

  

« Les nations pauvres, c’est là où le peuple est à son aise ; les nations riches, c’est là où il est ordinairement pauvre ».

 

« Les fabricants parcourent le monde en quête de débouchés pour les M/ses qui s’entassent ; il forcent le gouvernement à s’annexer des Congo, à s’emparer des Tonkin…ils vont alors chez les nations heureuses qui lézardent au soleil en fumant des cigarettes, poser des chemins de fer, ériger des fabriques et importer la malédiction du travail. »

 

« Nous avons aujourd’hui les filles et les femmes de fabrique, chétives fleurs aux pâles couleurs, au sang sans rutilance, à l’estomac délabré, aux membres alanguis !... Elles n’ont jamais connues le plaisir robuste et ne sauraient raconter gaillardement comment l’on cassa leur coquille ! »

 

« Les travailleurs, en coopérant à l’accumulation des capitaux productifs, contribuent à l’évènement qui, tôt ou tard, doit les priver d’une partie de leur salaire ».

 

« Travaillez, travaillez, prolétaires, pour agrandir la fortune sociale et vos misères individuelles ; travaillez, travaillez, pour que devenant plus pauvres, vous ayez plus de raisons de travailler et d’être misérables. Telle est la Loi inexorable de la production capitaliste. »

 

« Une bonne ouvrière ne fait avec le fuseau que 5 mailles à la mn, certains métiers circulaires en font 30.000 à la mn. Chaque mn de la machine équivaut donc à 100 h. de l’ouvrière… ou bien chaque mn de la machine délivre 10 jours de repos à l’ouvrière. Hors, a mesure que la machine se perfectionne et abat le travail de l’homme avec une rapidité et une précision sans cesse croissante, l’ouvrier, au lieu de prolonger son repos d’autant, redouble d’ardeur, comme s’il voulait rivaliser avec la machine. »

 

« En présence de cette double folie des travailleurs de se tuer de surtravail et de végéter dans l’abstinence, le grand problème de la production capitaliste n’est plus de trouver des producteurs, mais de découvrir des consommateurs, d’exciter leurs appétits et de leur créer des besoins factices (incroyable de lire cela en 1880, NDLR).

 

 

« Pour faire face à la fringale de travail et de production de leurs ouvriers, tous les produits sont adultérés pour en faciliter l’écoulement et en abréger l’existence. Notre époque sera appelée l’Age de la Falsification. »

 

« Et cependant, en dépit de la surproduction de M/ses, des falsifications, les ouvriers encombrent le marché, implorant : du travail ! du travail ! »

 

« Les ouvriers n’ont pu s’élever à l’intelligence de ce fait que, pour avoir du travail pour tous, il fallait le rationner pour chacun d’eux ».

 

« En Amérique, la machine envahit toutes les branches de la production agricole : pourquoi ? Parce que l’américain, libre et paresseux, aimerait mieux mille morts que la vie bovine du paysan français. »

 

Si, déracinant de son cœur le vice qui la domine et avilit sa nature, la classe ouvrière se levait dans sa force terrible, non pour réclamer les Droits de l’Homme, qui ne sont que les droits de l’exploitation capitaliste, non pour réclamer le Droit au Travail qui n’est que le droit à la misère, mais pour forger une loi d’airain, défendant à tout homme de travailler plus de 3 heures par jour, la Terre, la vieille Terre, frémissant d’allégresse, sentirait bondir en elle un nouvel Univers… Mais comment demander à un prolétariat corrompu par la morale capitaliste une résolution virile ? »

 

 

Et Lafargue d’appeler à son secours les philosophes de l’Antiquité :

 

« La Nature n’a fait ni cordonnier, ni forgeron ; de pareilles occupations dégradent les gens qui les exercent, vils mercenaires, misérables sans noms qui sont exclus par leur état même des droits politiques. Quand aux marchands accoutumés à mentir et à tromper, on ne les souffrira dans la cité que comme un mal nécessaire. Le citoyen qui se sera vili par le commerce de boutique sera poursuivit pour ce délit. » Platon, La République.

 

« Les gens qui se livrent aux travaux manuels ne sont élevés aux charges, et on a bien raison. La plupart, condamnés à être assis tout le jour, quelques-uns même à éprouver un feu continuel, ne peuvent manquer d’avoir le corps altéré et il est bien difficile que l’esprit ne s’en ressente. » Xénophon, Economique.

 

« Que peut-il sortir d’honorable d’une boutique, et qu’est-ce que le commerce peut produire d’honnête ? Tout ce qui s’appelle boutique est indigne d’un honnête homme, les marchands ne pouvant gagner sans mentir et quoi de plus honteux que le mensonge. Donc, on doit regarder comme quelque chose de bas et de vil le métier de toux ceux qui vendent leur peine et leur industrie ; car quiconque donne son travail pour de l’argent se vend lui-même et se met au rang des esclaves. » Cicéron, Des devoirs.

 

« Le travail emporte tout le Temps et avec lui on n’a nul loisir pour la République et les amis. » Xénophon, Economique.

On ne le répétera jamais assez. Il faut du temps autant pour nos loisirs que pour exercer nos Droits et Devoirs de citoyens. La Démocratie véritable n’est possible qu’a ce prix. Quelqu’un qui passe son temps au travail ne peut pas se donner les moyens de ne pas être manipulé politiquement. Parler de Démocratie dans cette société qui est la nôtre actuellement, n’est qu’un vaste foutage de gueule. NDLR

 

« Le grand titre de Lycurgue, le plus sage des hommes, est d’avoir accordé des loisirs aux citoyens de la République en leur interdisant un métier quelconque.» Plutarque, La vie de Lycurgue.

 

Et Lafargue de citer les penseurs de son temps (et il en y a aujourd’hui qui ose faire remarquer la même chose) qui disaient que dans l’Antiquité ce n’était possible que parce qu’existait l’esclavage. Et bien évidemment, Lafargue de répondre en faisant remarquer qu’aujourd’hui (et c’est donc encore plus vrai en 2008 qu’en 1880) la machine est là pour remplacer l’esclave. NDLR

D’ailleurs Lafargue fait remarquer que dès l’Antiquité, Aristote écrivait : « Si chaque outil pouvait exécuter sans sommation, ou bien de lui-même, sa fonction propre, comme les chefs d’œuvre de Dédale se mouvaient d’eux-mêmes, comme les trépieds de Vulcain se mettaient spontanément à leur travail sacré ; si, par exemple les navettes des tisserands tissaient d’elles-mêmes, le chef d’atelier n’aurait plus besoin d’aides, ni le maître d’esclaves.»

 

 

« La bourgeoisie, alors qu’elle luttait contre la noblesse, soutenue par le clergé, arbora le libre examen et l’athéisme ; mais triomphante elle changea de ton et d’allure ; et, aujourd’hui, elle entend étayer de la religion sa suprématie économique et politique. Aux XVème et XVIème siècle, elle avait allègrement repris la tradition païenne et glorifiait la chair et ses passions, réprouvés par le christianisme ; de nos jours, gorgée de biens et de jouissances, elle renie les enseignements de ses penseurs, les Rabelais, les Diderot, et prêche l’abstinence aux salariés. La morale capitaliste, piteuse parodie de la morale chrétienne, frappe d’anathème la chair du travailleur ; elle prend pour idéal de réduire le producteur au plus petit minimum de besoins, de supprimer ses joies et ses passions et de le condamner au rôle de machine délivrant du travail sans trêve ni merci. »

 

Et il en fut aussi du communisme, révolutionnaire à l’époque de Marx et Lafargue ; mais, comme la bourgeoisie, devenu réactionnaire une fois au pouvoir.

 

Cornélius Castoriadis écrira : « Il n’y a qu’une mince différence entre capitalisme et communisme ; l’un est privé, l’autre étatique ; mais les 2 reposent sur la même chose : l’esclavage de l’homme au travail et la destruction de la Nature. »

 

Si Lafargue réclame 3 heures maximum par jour en 1880, notre revendication de 2 heures par jour aujourd’hui est a considérée comme un sacré cadeau que l’on fait aux bourgeois.

 

 

 


 

Paul Lafargue (1842 – 1911) : né à Santiago de Cuba d’origine juive bordelaise antillaise par sa mère et mulâtre par son père, il suit des études de médecine à Paris. Il écrit dans les journaux qui seront ceux de la Commune. Exilé à Londres, il rencontre Karl Marx et épouse sa fille, Laura (elle traduira en français la plupart des textes de son père). En 1880, après être passé par l’Espagne où il s’opposera aux anarchistes, il revient en France et se lie à Jules Guesde et sera le lien entre lui et Marx et Engels. Entre séjours en prison (c’est là qu’il rédige ce Droit à la Paresse) et à l’Assemblée nationale où il est élu député de Lille, il est LE représentant de l’extrême-gauche de l’époque (bien plus intéressant que ceux d’aujourd’hui) aussi bien dans les instances de l’Internationale qu’au journal l’Humanité. Il se suicide avec Laura pour ne pas subir la décrépitude de la vieillesse.

 

 

Au moment où Sarkosy nous fait son laïus sur les vertus du travail,

 


 

et tous les cons qu’il intoxique,

 

 


 

il nous apparaît plus que nécessaire de faire découvrir (ou re-découvrir pour ceux qui l’ont oublié, notamment à gauche) à ceux à qui l’on s’efforce d’éviter de le faire connaître (notamment à gauche), un personnage absolument indispensable à toute culture politique et sociétale digne de ce nom. Et qui de plus est pour nous une référence programmatique (article 11 : http://poilagratter.over-blog.net/article-7271921.html).

 


 

 

 

 

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M
Publié ici, bande d'abrutis : https://www.marxists.org/francais/lafargue/works/1880/00/lafargue_18800000.htm<br /> Et c'est encore moi qui suis obligé de le préciser ?
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